Dordogne : les papeteries de Condat en péril, près de 200 emplois menacés

Deux ans après la fermeture d’une des deux lignes de production et un plan social supprimant près de la moitié des effectifs, les Papeteries de Condat, ancien fleuron industriel de Dordogne, sont en grande difficulté. Selon le syndicat FO, tous les scenarios sont désormais sur la table.

On ne voit pas trop comment l’usine pourrait vivre avec une seule machine, pronostiquait il y a deux ans Patricia Canto, secrétaire FO du CSE des Papeteries de Condat, alors en pleine mobilisation contre la fermeture de l’une des deux lignes de production et un plan social supprimant 174 postes, soit près de la moitié des effectifs.

Les craintes de la militante semblent malheureusement se réaliser. Fin août, la direction a informé les représentants du personnel qu’elle garantissait le versement des salaires uniquement jusqu’en décembre 2025. Pour la suite, on ne sait pas, c’est le point d’interrogation, s’inquiète Emmanuel Garcia, élu FO au CSE. La maison-mère, le groupe Lecta, détenu par plusieurs fonds d’actions et d’investissements, a également cessé, depuis le mois d’avril, de rembourser à la Région Nouvelle-Aquitaine le prêt à taux zéro de 19 millions d’euros qui lui avait été accordé en 2023.

Les Papeteries de Condat, usine plus que centenaire située au Lardin-Saint-Lazare, en Dordogne, est un ancien fleuron industriel et qui, sur ce territoire, a tenu un rôle majeur au plan de l’emploi. De 1200 salariés dans les années 1980, elle n’en compte plus que 200 aujourd’hui.

Jusqu’en 2023, c’était la dernière entreprise française à produire du papier couché, un papier de haute qualité sur lequel était notamment imprimé le Prix Goncourt. La machine a été mise à l’arrêt sur décision du groupe Lecta, arguant d’une baisse de commandes. Pour FO, il s’agissait plutôt d’une délocalisation, doucement mais sûrement, de la production dans d’autres usines du groupe, en Italie et en Espagne, pour réduire les coûts de fabrication.

Une usine à l’arrêt 10 jours par mois

Une seule ligne de production subsiste désormais, dédiée au papier glassine pour les étiquettes, un marché bien plus concurrentiel. L’activité tourne encore, mais au ralenti. L’usine est à l’arrêt dix jours par mois. Même quand on produit, on ne gagne pas d’argent. L’usine a été conçue pour fonctionner avec trois lignes de production, pas une seule. Les frais fixes sont énormes. On ne paie plus nos fournisseurs. On achète la pâte à papier et les produits chimiques au cul du camion, poursuit Emmanuel Garcia.

D’autres signaux alertent le militant, comme la rétrocession des filiales des Papeteries au groupe Lecta, ou le déménagement récent du siège social, de Paris au Lardin Saint-Lazare. Vente, redressement, liquidation, on ne sait pas ce qui va se passer, tous les scenarios sont sur la table, poursuit-il. Le CSE a saisi le cabinet Secafi pour une expertise économique.

Le 2 septembre, les organisations syndicales et les élus locaux se sont réunis à la mairie du Lardin-Saint-Lazare pour faire un point sur la situation. Ils ont décidé d’envoyer une lettre aux actionnaires du groupe Lecta pour leur demander de vendre l’usine.

Emmanuel Garcia, très attaché à l’usine où travaillait déjà son arrière-grand-père, cherche surtout à comprendre l’attitude de ces actionnaires, qui refusent de dévoiler leur stratégie. Ils ont investi 140 millions d’euros dans l’usine. La ligne de production a été refaite. On a une chaudière toute neuve qui a coûté plus de 50 millions d’euros. Mais il ne se passe rien. Le groupe ne cherche pas à développer de nouveaux produits pour augmenter les commandes. Il ne cherche pas non plus à nous vendre. On ne comprend pas pourquoi il a tant investi pour ne rien en faire derrière, s’interroge-t-il.

A lire également