La mise en œuvre de la réforme 3DS visant à améliorer l’accès au logement social des « travailleurs essentiels »
La recherche porte sur les évolutions récentes de l’intervention en faveur du logement des travailleurs. Pour cela, elle s’intéresse à la mise en œuvre de la réforme inscrite dans la loi 3DS (différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification) du 9 février 2022 dans le but d’améliorer l’accès au parc locatif social des « travailleurs essentiels », ainsi qu’à son articulation avec les interventions développées ces dernières années autour du « lien emploi-logement ».
Le premier volet vise à décrire les modalités de mise en œuvre de cette réforme. Celle-ci repose en grande partie sur les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) chargés de définir la notion de « travailleur essentiel » et d’élaborer des objectifs d’attributions annuels en faveur de cette catégorie de demandeurs dans les territoires. L’enquête a permis de mettre en évidence l’existence à un niveau global d’un retard dans la mise en œuvre de la loi 3DS, ainsi qu’une hétérogénéité prononcée de l’état d’avancement des collectivités dans ce domaine. Le caractère hétérogène de la mise en œuvre et le retard pris globalement par celle-ci dans les territoires proviennent ensuite de facteurs liés au système des attributions de logements (inadaptation des outils mobilisés, inégale répartition géographique des ressources mobilisables par les EPCI pour compenser les limites du système d’attributions). L’existence de freins à ce niveau n’a cependant pas empêché une partie des intercommunalités d’avancer.
La recherche vise également à apprécier en quoi les arbitrages opérés par les EPCI dans le cadre de la mise en œuvre de la loi 3DS croisent les politiques développées de plus longue date par les employeurs et les collectivités autour du « lien emploi-logement ». Pour cela, elle propose un panorama des interventions mises en œuvre autour de ce lien tant du côté des employeurs que de la part des intercommunalités.
La recherche s’attache pour finir à identifier les limites actuelles des interventions déployées pour améliorer l’accès au logement des actifs. Ces limites se manifestent dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme inscrite dans la loi 3DS (mise en concurrence des catégories de demandeurs, contradictions entre les objectifs de la réforme) mais tiennent également aux interventions mises en œuvre autour du « lien emploi-logement » (risque de renforcement des inégalités entre travailleurs dans l’accès au logement et de fragilisation des parcours résidentiels et professionnels) et au déficit d’articulation entre les différents types d’interventions visant à améliorer l’accès au logement (ignorance réciproque, logique de fragmentation de l’action des employeurs avec une offre dédiée hors du parc social locatif).
Ces tendances apparaissent symptomatiques des tâtonnements qui caractérisent aujourd’hui l’intervention en faveur du logement des travailleurs. De fait, l’enjeu dans ce domaine ne se limite plus uniquement à la réactualisation des modalités de l’action au regard des besoins émergents au croisement de l’emploi et du logement. Il consiste aussi à identifier les termes d’un compromis similaire à celui formalisé après-guerre par la création du 1 % logement, entre une conception du logement au service de l’économie et une approche incluant celui-ci parmi les éléments de la protection sociale auxquels le travail ouvre accès.