L’astreinte
Un salarié est engagé en 2016 par un hôtel en qualité de cuisinier, puis d’employé d’exploitation polyvalent jusqu’au 2 décembre 2019, date à laquelle il est licencié.
Il saisit le conseil de prud’hommes aux fins de requalification de ses astreintes en temps de travail effectif, voire en heures supplémentaires.
La cour d’appel fait droit à sa demande mais limite ses temps d’astreinte au motif que les interventions du salarié au titre de l’accès des clients à l’hôtel ne pouvaient qu’être limitées, durant la nuit qu’il passait à l’hôtel, compte tenu de l’existence d’une borne d’accès 24 heures sur 24, mais que néanmoins le salarié était appelé à intervenir régulièrement durant ses périodes d’astreinte compte tenu de la vétusté des lieux et du matériel de l’hôtel.
La chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 mai 2025 (n°24-14319), casse la décision de la cour d’appel en rappelant la position de la CJUE.
En effet, la CJUE considère qu’à partir du moment où les contraintes imposées au travailleur sont d’une nature telle qu’elles affectent objectivement et très significativement la faculté, pour ce dernier, de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels ne sont pas sollicités et de consacrer ce temps à ses propres intérêts, l’intégralité des périodes d’astreinte doit être assimilée à du temps de travail effectif (CJUE, 9 mars 2021, D.J. c/ Radiotelevizija Slovenija, C-344/19).
En l’espèce, la cour d’appel a privé sa décision de base légale en limitant les périodes d’astreinte prises en compte comme du travail effectif, alors qu’elle constatait que le salarié était amené à intervenir régulièrement pendant les périodes d’astreinte, sans vérifier si l’intéressé, qui soutenait que son numéro de téléphone figurait sur la borne automatique de l’hôtel, avait été soumis, au cours de ces périodes, à des contraintes d’une intensité telle qu’elles avaient affecté, objectivement et très significativement, sa faculté de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels n’étaient pas sollicités et de vaquer à des occupations personnelles
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Le salarié pouvant être perpétuellement dérangé, l’intégralité des périodes d’astreinte devait être requalifiée en temps de travail effectif.
Elle renvoie donc l’affaire devant la cour d’appel de Bordeaux.
L’article L. 3121-1 du Code du travail dispose :
La durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
L’article L. 3121-9 du Code du travail stipule quant à lui :
Une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, doit être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise.
La durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif.
La période d’astreinte fait l’objet d’une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos.
Les salariés concernés par des périodes d’astreinte sont informés de leur programmation individuelle dans un délai raisonnable.