Chez Michelin, les craintes sur l’emploi toujours plus vives
Le leader mondial du pneumatique se sépare de 1 254 salariés, lesquels partent avec des primes et des congés de licenciement bien en deçà des moyens du groupe. Au vu de la stratégie industrielle de délocalisations en cours, FO craint pour l’avenir d’autres sites.
Clap de fin pour les usines Michelin de Cholet (Maine-et-Loire) et de Vannes (Morbihan). Les négociations du PSE annoncé début novembre, condamnant 1 254 emplois, viennent de s’achever sur une note amère pour les salariés des deux sites, spécialisés dans les pneus de poids lourds et camionnettes. L’employeur devra verser à chacun d’entre eux 40 000 euros brut de prime de licenciement, avec une majoration de 1 250 euros par année d’ancienneté, et un congé de reclassement de deux à six mois de salaire selon l’âge. C’est près de deux fois moins que ce que demandait l’intersyndicale, à laquelle participe FO notamment.
Pour les syndicats, c’est donc un plan au rabais compte tenu des moyens du groupe – 1,9 milliard d’euros de bénéfice net en 2024 – et du préjudice subi par les salariés. Michelin a une fâcheuse tendance à profiter des aides de l’État puis à faire des PSE, dénonce Emmanuel Dubarre, secrétaire général adjoint de la Fédération FO de la Chimie. Sa stratégie est de diminuer les effectifs en France, de délocaliser et de produire des pneumatiques dans des pays à moindre coût de main-d’œuvre. Après des fermetures en série ces vingt dernières années, FO craint que Michelin ne s’arrête pas là et que certains sites aient une épée de Damoclès au-dessus de la tête. La situation de l’usine de Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire), qui tourne à environ 50 % de ses capacités, inquiète particulièrement.
Une question de souveraineté économique
La direction de Michelin met en cause la surcapacité des sites de Cholet et de Vannes, la baisse des ventes de pneumatiques ainsi que la concurrence asiatique. Autant de contrariétés qui ne l’ont pourtant pas empêchée de distribuer 974 millions d’euros de dividendes en 2024. Dans son rapport, le cabinet d’expertise mandaté par le Comité social et économique (CSE) de Michelin a d’ailleurs mis en doute le motif économique avancé par la direction pour ces fermetures de sites.
J’espère que Michelin va réfléchir un peu à sa stratégie industrielle, lance, sans illusions toutefois, Emmanuel Dubarre, fustigeant le danger de telles fermetures : que la France devienne un désert industriel. Or, rappelle-t-il, cela ne peut qu’alarmer, notamment du point de vue de la souveraineté économique. Si l’on revivait un épisode comme celui de 2020 avec le Covid, on risquerait de se retrouver le bec dans l’eau car on n’aurait plus de production en France.